Marche du Cayor pour le bitumage de la route Mékhé Thilamakha. Compréhensible, mais faut pas se tromper de cibles. (Par Cheikh Fall journaliste, chronique sans Permission).

SANS PERMISSION N°8. 

Marche du Cayor pour le bitumage de la route Mékhé Thilamakha. Compréhensible, mais faut pas se tromper de cibles. Par Cheikh Fall  journaliste.

Une frange de la population du cayor a donc battu le pavé, pour réclamer avec véhémence, la réhabilitation de la route Mékhé-Thilmakha Mbakol via Mérina Ndakhar et Niakhéne. C’était le 6 juin 2022.

Tout le monde est d’accord que cette route doit être reconstruite. Elle doit l’être de par la densité du trafic, de par sa dimension économique, de par le grand Magal de Touba, de par son âge, et de par la poussière qui s’abatte sur les populations et autres riverains. Cette route est également une voie d’entrée et de sortie  vers plusieurs régions du pays. Elle joue par conséquent, un rôle de premier plan dans les efforts de développement socio-économique et  de bien être familial.

Autant d’arguments qui justifient, l’urgence de sa réhabilitation. La route est longue seulement de 43km. Les usagers qui l’empruntent, vivent la peur de leur vie au quotidien. C’est donc compréhensible que le cayor  crie son ras-le-bol et se fasse entendre.

Sans permission se joint au combat à sa manière. Oui, cette route expose les populations aux dangers. Monsieur le Président de la République, vous  êtes le seul espoir de ce Cayor qui vous croit. Les élus locaux se déploient corps et âmes, frappent aux portes de vos ministres et directeurs généraux, mais ça tarde à se concrétiser. Voilà pourquoi, meurt d’impatience le Cayor, qui a battu le pavé pour vous parler.

Naturellement les maires concernés au premier plan, étaient au front de la marche. Le maire de Niakhéne au ‘’foulard de la colère’’ n’y est pas allé par quatre chemins, pour exprimer son inquiétude et celle des populations. Moustapha Sylla a dit tout haut, le mal qu’il ressent face à ce désastre. Tout comme l’adjointe au maire de Mérina Dakhar, qui n’a pas mis de gants pour s’exprimer le cœur meurtri. Ce qui est extraordinaire ici, c’est la synergie d’actions de ces deux communes, qui partagent le même destin.

Les Maires de Niakhéne et de Mérina Ndakhar, qui souffrent le martyr de cette route inadaptée au contexte du moment, ont donc l’obligation de porter cette forte demande sociale. Bravo ! Rien à dire sur cette initiative. Battez-le pavé jusqu’à ce que les premières couches de bitume soient posées sur cet axe, Mékhé-Thilmakha.

Seulement, il ne faut pas se tromper de cibles, car les Maires Aymérou Gningue et Moustapha Sylla ou encore la Présidente du Conseil Départemental de Tivaouane, n’ont pas les moyens de vous construire des routes. Ce qu’ils ont, c’est la possibilité de vous faire construire des routes. Et je ne doute pas un seul instant, que leurs bâtons de pèlerins sont toujours portés à la recherche de dénouement. Soyez soudés derrière vos responsables et continuez de leur faire confiance. Ils seront les premiers à applaudir si cette route arrivait à être  bitumée.

Sans Permission a suivi avec beaucoup d’intérêt la marche du 06 juin 2022. Et au vu de tout ce que j’ai entendu, je me fais le devoir de partager quelques étapes qui fondent l’existence de nos territoires et leurs limites objectives sur les chemins du développement. La construction de routes dépasse de loin les possibilités de ces collectivités territoriales, qui peinent à couvrir la santé, l’éducation, l’électrification, et le cadre de vie des populations.( des domaines de compétences transférées).Toutes les lois et tous les décrets qui ont marqué les différentes étapes de la réforme de l’administration territoriale, ont plutôt favorisé la libre administration et l’autonomie de gestion des collectivités locales. En claire le sous préfet, représentant de l’état, ne gère plus, mais exerce le contrôle. Ainsi expliqué, nous contribuerons à une meilleure compréhension du rôle de chacun. Vos élus ne détiennent pas la puissance publique, ils portent tout simplement le lourd fardeau de vos nombreuses doléances et préoccupations.

La première réforme de 1972 à 1996 ou le test de la responsabilisation

La première réforme de l’administration territoriale et locale, intervenue en 1972 fut euphorique. Nos parents et arrières parents vont enfin être responsabilisés, par la création des communautés rurales. C’est la loi n° 72-25 du 25 avril 1972. Mais les premiers PCR (Présidents de ces nouvelles communautés rurales vont vite déchanter. Ils étaient élus par les populations, mais c’est le sous préfet nommé,  qui gérait Tout. Oui cette réforme de 1972, n’avait pas donné beaucoup de pouvoir aux élus. Au contraire, elle avait renforcé le pouvoir de contrôle des représentants de l’Etat.

Donc aucune marge de manœuvre. Mais comme qui dirait, la patience est au bout de l’effort. En 1990, la loi n° 90-37 du 8 octobre 1990, retire la gestion des communautés rurales aux sous-préfets et la remet entre les mains des présidents de conseils ruraux. La encore, ça s’arrête à l’euphorie, car l’Etat central, qui a pourtant décidé de cette réforme, ne l’a accompagné d’aucune mesure. Les PCR n’ont que le titre à porter. Ils ont enduré et exercé leur mission avec beaucoup de difficultés. Pour tout dire, cette première réforme n’a pas beaucoup soulagé. C’est en 96, plus précisément le lundi 05 Février 1996, que l’assemblée a délibéré et adopté le projet de loi portant Code des Collectivités locales.

Le Président de la République promulgue et c’est parti. La libre administration des collectivités locales est actée. La région, (conseil régional) la commune et la communauté rurale sont dotées de la personnalité morale et de l’autonomie financière et s’administrent désormais librement, par des conseils élus au suffrage universel. Dans la même foulée, intervient la suppression des tutelles administratives, financières et techniques. Cette deuxième réforme est accompagnée d’un nouveau dispositif de contrôle. Ce qui est logique, car il s’agit toute de même de la gestion des deniers publics.

Ce contrôle s’exerce dans le respect de la légalité et l’orthodoxie budgétaire et financière. Cette réforme a renforcé le pouvoir des élus? surtout dans le domaine foncier? qui était jusque la géré par les représentants de l’Etat. Les gouverneurs, préfets et sous préfets sont alors dessaisis de toute attribution de parcelles ou de terrains. Cet acquis fondamental a-t-il profité aux populations ? Toute la question est là. De toute évidence, chacun peut évaluer. Cette réforme, si importante soit elle, n’a pas tout réglé pour autant? car les moyens n’ont pas suivi. L’Etat central détient tout ou presque. Conséquence, ces collectivités territoriales peinent à réussir leur envol et à satisfaire les nombreuses préoccupations des populations. Même pour élaborer leur plan de développement, il leur faut beaucoup de gymnastique pour mobiliser les moyens nécessaires. Que ce fut dur de recouvrer l’impôt ou la taxe dans les collectivités où les élus osent s’y aventurer.

L’Etat a transféré neuf domaines de compétence aux collectivités locales sans l’accompagnement qui sied. Aucun PCR ou maire ne pourra dire le contraire. Dans ces conditions? comment voulez que les maires Aymérou Gningue et Moustapha Sylla puissent vous réaliser des routes. Non. Ne vous trompez pas de cibles. Ce que ces responsables locaux peuvent faire, c’est d’élever la voix, de se rendre dans les bureaux des directeurs généraux compétents en la matière. Souvent ils se voient charrier s’ils ont la chance d’être reçus. Un maire m’a avoué être témoin d’un coup de fil du Président de la République à un Directeur Général, pour l’instruire de diligenter ses directives, mais le téléphone de ce dernier a sonné dans le vide jusqu’à la fin de l’audience. Quant est-ce que ce maire aura-t-il, cette belle opportunité de rencontrer le Président de la République. Les travaux de bitumage des routes Bambey-Baba Garage-Keur Samba Kane -Touba Toul -Baba Garage -Mékhé- Fasse Boye ont été lancés le 19 mai 2022 par le Ministre en charge des infrastructures, du désenclavement et des transports terrestres. Utilisez les mêmes  moyens de lutte jusqu’à la victoire finale.

2013, le grand bond.

C’est l’année de la communalisation intégrale. L’Assemblée nationale a adopté, le projet en sa séance du jeudi 19 décembre 2013, le Président de la République promulgue la loi. C’est l’acte III de la décentralisation au Sénégal. Plus de conseil régional plus de communauté rurale. Ces collectivités sont remplacées par des conseils départementaux et des communes. A partir de cette troisième réforme, toutes les communes sont d’égale dignité? mais se différencient par la taille et par les moyens. Mais ce qui est novateur ici, c’est que cette troisième réforme offre à la commune la possibilité d’accéder au confort de la voirie et des routes bitumées, alors que la communauté rurale se contentait de pistes de production.

Le maire Aymérou Gningue, muni de cette opportunité et utilisant ses solides connaissances, a  obtenu le bitumage de l’axe Kelle-Mérina Ndakhar via Nguiguis. C’est le même combat qu’il mène sans tambour ni trompette, pour obtenir le bitumage de la route Mékhé Thilamakha -Mbakol. Le Maire de Niakhéne Moustapha Sylla, utilise sa manière pour gagner le combat du bitumage non seulement de cette route, mais aussi pour réussir le pari de la voirie de sa commune. Ce qui ferait une bonne bouffée d’oxygène pour les populations. C’est dans la possibilité des maires, conformément à l’esprit de l’acte III de la décentralisation, qui prône l’équité territoriale, de réclamer ces réalisations.

S’agissant du combat pour le bitumage de l’axe Mékhé-Thilmakha, c’est compréhensible qu’il soit l’affaire de tous. Cayoriens ou pas. Car cette route est nationale et relève de la compétence exclusive de l’Etat, donc de l’Ageroute. Portez le combat à ces niveaux. Mais il y’a de l’espoir. Et nous sentons la victoire finale si proche, qu’il ne faut pas laisser de la place aux invectives et autres menaces.

Comment ne pas espérer, face à une route qui a été décapée, qui a vu sa couche de bitume enlevée sur une bonne partie du parcours. Sa réhabilitation est donc imminente, si l’on tient compte de tous ces facteurs. Sinon comment comprendre un tel tort fait aux populations. Oui il y’a urgence à achever les travaux de cette route. Le député maire président Aymerou Gningue n’invente rien, ne dira jamais ce qu’il a envie de dire, mais ce qu’il doit dire tout simplement. Il n’est pas vantard. Il est juste sur l’essentiel. D’ailleurs, qui peut essorer un pantalon sans le tordre.

L’enfant de Nguiguis est assurément un prototype de personnalité inébranlable. Il est au service de son terroir et de son pays. Un véritable accélérateur de protons. Accrochez vos ceintures. Quant à son collègue maire de Niakhéne, nous ne l’avons jamais pratiqué, ni côtoyé, mais nous saluons son geste. Il a bravé et enduré. Il a dit ce qu’il avait à dire lors de la marche, tout comme l’adjointe au Maire de Mérina Dakhar qui dit ce qu’elle avait à dire. Ce n’est pas faire un panégyrique. Loin s’en faut ! C’est juste un devoir. Et le premier magistrat de Niakhéne est sorti pour participer à la bataille du bitumage de la route Mékhé -Thilmakha à sa manière.

Comme la manière de cet ambulancier qui a pleuré pour avoir été témoin de souffrances des personnes qu’il référait. Maintenez cet élan sans offenser personne. De prime à bord, chacun est libre d’y aller avec sa manière, avec son tempérament, sans accuser personne. Il est donc compréhensible que le Cayor réclame la réhabilitation de la route Mékhé-Thilmakha, mais pour autant, les populations ne doivent point utiliser la langue de bois, ni se tromper de cibles. Portez ce combat, juste pour convaincre. 

Cheikh Fall